La Petite Bibliothèque Verte Hallal

Parce qu'un écrivain qui dénonce l'islam ne peut pas fondamentalement être mauvais.

Montesquieu (1689 -1755), De l'Esprit des lois, Livre XXIV extraits.

CHAPITRE III.
QUE LE GOUVERNEMENT MODÉRÉ CONVIENT MIEUX A LA RELIGION CHRÉTIENNE ET LE GOUVERNEMENT DESPOTIQUE A LA MAHOMÉTANE.

La religion chrétienne est éloignée du pur despotisme c’est que la douceur étant si recommandée dans l’Évangile, elle s’oppose à la colère despotique avec laquelle le prince se feroit justice, et exerceroit ses cruautés.

Cette religion défendant la pluralité des femmes, les princes y sont moins renfermés, moins séparés de leurs sujets, et par conséquent plus hommes ; ils sont plus disposés à se faire des lois, et plus capables de sentir qu’ils ne peuvent pas tout.

Pendant que les princes mahométans donnent sans cesse la mort ou la reçoivent, la religion, chez les chrétiens, rend les princes moins timides, et par conséquent moins cruels. Le prince compte sur ses sujets, et les sujets sur le prince. Chose admirable ! la religion chrétienne, qui ne semble avoir d’objet que la félicité de l’autre vie, fait encore notre bonheur dans celle-ci.

C’est la religion chrétienne qui, malgré la grandeur de l’empire et le vice du climat, a empêché le despotisme de s’établir en Éthiopie, et a porté au milieu de l’Afrique les moeurs de l’Europe et ses lois.

Le prince héritier d’Éthiopie jouit d’une principauté, et donne aux autres sujets l’exemple de l’amour et de l’obéissance. Tout près de là on voit le mahométisme faire renfermer les enfants du roi de Sennar : à sa mort, le Conseil les envoie égorger, en faveur de celui qui monte sur le trône.

Que, d’un côté, l’on se mette devant les yeux les massacres continuels des rois et des chefs grecs et romains, et, de l’autre, la destruction des peuples et des villes par ces mêmes chefs, Thimur et Gengiskan, qui ont dévasté l’Asie ; et nous verrons que nous devons au christianisme, et dans le gouvernement un certain droit politique, et dans la guerre un certain droit des gens, que la nature humaine ne sauroit assez reconnoître.

C’est ce droit des gens qui fait que, parmi nous, la victoire laisse aux peuples vaincus ces grandes choses : la vie, la liberté, les lois, les biens, et toujours la religion, lorsqu’on ne s’aveugle pas soi-même.

On peut dire que les peuples de l’Europe ne sont pas aujourd’hui plus désunis que ne l’étoient dans l’empire romain, devenu despotique et militaire, les peuples et les armées, ou que ne l’étoient les armées entre elles : d’un côté, les armées se faisoient la guerre ; et, de l’autre, on leur donnoit le pillage des villes et le partage ou la confiscation des terres.


CHAPITRE IV.
CONSÉQUENCES DU CARACTÈRE DE LA RELIGION CHRÉTIENNE ET DE CELUI DE LA RELIGION MAHOMÉTANE.

Sur le caractère de la religion chrétienne et celui de la mahométane, on doit, sans autre examen, embrasser l’une et rejeter l’autre : car il nous est bien plus évident qu’une religion doit adoucir les moeurs des hommes, qu’il ne l’est qu’une religion soit vraie.

C’est un malheur pour la nature humaine, lorsque la religion est donnée par un conquérant. La religion mahométane, qui ne parle que de glaive, agit encore sur les hommes avec cet esprit destructeur qui l’a fondée.

L’histoire de Sabbacon(11), un des rois pasteurs, est admirable. Le dieu de Thèbes lui apparut en songe, et lui ordonna de faire mourir tous les prêtres d’Égypte. Il jugea que les dieux n’avoient plus pour agréable qu’il régnât, puisqu’ils lui ordonnoient des choses si contraires à leur volonté ordinaire ; et il se retira en Éthiopie.


CHAPITRE VIII.
DE L’ACCORD DES LOIS DE LA MORALE AVEC CELLES DE LA RELIGION.

Dans un pays où l’on a le malheur d’avoir une religion que Dieu n’a pas donnée, il est toujours nécessaire qu’elle s’accorde avec la morale ; parce que la religion, même fausse, est le meilleur garant que les hommes puissent avoir de la probité des hommes.

Les points principaux de la religion de ceux de Pégu sont de ne point tuer, de ne point voler, d’éviter l’impudicité, de ne faire aucun déplaisir à son prochain, de lui faire, au contraire, tout le bien qu’on peut. Avec cela ils croient qu’on se sauvera dans quelque religion que ce soit ; ce qui fait que ces peuples, quoique fiers et pauvres, ont de la douceur et de la compassion pour les malheureux.


CHAPITRE XI.
DE LA CONTEMPLATION.

Les hommes étant faits pour se conserver, pour se nourrir, pour se vêtir, et faire toutes les actions de la société, la religion ne doit pas leur donner une vie trop contemplative.

Les Mahométans deviennent spéculatifs par habitude ; ils prient cinq fois le jour, et chaque fois il faut qu’ils fassent un acte par lequel ils jettent derrière leur dos tout ce qui appartient à ce monde : cela les forme à la spéculation. Ajoutez à cela cette indifférence pour toutes choses, que donne le dogme d’un destin rigide.

Si d’ailleurs d’autres causes concourent à leur inspirer le détachement, comme si la dureté du gouvernement, si les lois concernant la propriété des terres, donnent un esprit précaire : tout est perdu.

La religion des Guèbres rendit autrefois le royaume de Perse florissant ; elle corrigea les mauvais effets du despotisme : la religion mahométane détruit aujourd’hui ce même empire.


CHAPITRE XIV.
COMMENT LA FORCE DE LA RELIGION S’APPLIQUE A CELLE DES LOIS CIVILES.

Comme la religion et les lois civiles doivent tendre principalement à rendre les hommes bons citoyens, on voit que lorsqu’une des deux s’écartera de ce but, l’autre y doit tendre davantage : moins la religion sera réprimante, plus les lois civiles doivent réprimer.

Ainsi, au Japon, la religion dominante n’ayant presque point de dogmes, et ne proposant point de paradis ni d’enfer, les lois, pour y suppléer, ont été faites avec une sévérité, et exécutées avec une ponctualité extraordinaires.

Lorsque la religion établit le dogme de la nécessité des actions humaines, les peines des lois doivent être plus sévères et la police plus vigilante, pour que les hommes, qui, sans cela, s’abandonneroient eux-mêmes, soient déterminés par ces motifs ; mais si la religion établit le dogme de la liberté, c’est autre chose.

De la paresse de l’âme, naît le dogme de la prédestination mahométane ; et du dogme de cette prédestination naît la paresse de l’âme. On a dit : Cela est dans les décrets de Dieu, il faut donc rester en repos. Dans un cas pareil, on doit exciter par les lois les hommes endormis dans la religion.

Lorsque la religion condamne des choses que les lois civiles doivent permettre, il est dangereux que les lois civiles ne permettent de leur côté ce que la religion doit condamner ; une de ces choses marquant toujours un défaut d’harmonie et de justesse dans les idées, qui se répand sur l’autre.

Ainsi les Tartares de Gengiskan, chez lesquels c’étoit un péché, et même un crime capital, de mettre le couteau dans le feu, de s’appuyer contre un fouet, de battre un cheval avec sa bride, de rompre un os avec un autre, ne croyoient pas qu’il y eût de péché à violer la foi, à ravir le bien d’autrui, à faire injure à un homme, à le tuer. En un mot, les lois qui font regarder comme nécessaire ce qui est indifférent, ont cet inconvénient, qu’elles font considérer comme indifférent ce qui est nécessaire.

Ceux de Formose croient une espèce d’enfer ; mais c’est pour punir ceux qui ont manqué d’aller nus en certaines saisons, qui ont mis des vêtements de toile et non pas de soie, qui ont été chercher des huîtres, qui ont agi sans consulter le chant des oiseaux ; aussi ne regardent-ils point comme péché l’ivrognerie et le dérèglement avec les femmes ; ils croient même que les débauches de leurs enfants sont agréables à leurs dieux.

Lorsque la religion justifie pour une chose d’accident, elle perd inutilement le plus grand ressort qui soit parmi les hommes. On croit, chez les Indiens, que les eaux du Gange ont une vertu sanctifiante ; ceux qui meurent sur ses bords, sont réputés exempts des peines de l’autre vie, et devoir habiter une région pleine de délices ; on envoie, des lieux les plus reculés, des urnes pleines des cendres des morts, pour les jeter dans le Gange. Qu’importe qu’on vive vertueusement, ou non ? on se fera jeter dans le Gange.

L’idée d’un lieu de récompense emporte nécessairement l’idée d’un séjour de peines ; et quand on espère l’un sans craindre l’autre, les lois civiles n’ont plus de force. Des hommes qui croient des récompenses sûres dans l’autre vie échapperont au législateur ; ils auront trop de mépris pour la mort. Quel moyen de contenir par les lois un homme qui croit être sûr que la plus grande peine que les magistrats lui pourront infliger, ne finira dans un moment que pour commencer son bonheur ?


CHAPITRE XVII.
CONTINUATION DU MÊME SUJET (COMMENT LES LOIS DE LA RELIGION CORRIGENT LES INCONVÉNIENTS DE LA CONSTITUTION POLITIQUE)

Lorsqu’il y a beaucoup de sujets de haine dans un État, il faut que la religion donne beaucoup de moyens de réconciliation. Les Arabes, peuple brigand, se faisoient souvent des injures et des injustices. Mahomet fit cette loi : « Si quelqu’un pardonne le sang de son frère il pourra poursuivre le malfaiteur pour des dommages et intérêts ; mais celui qui fera tort au méchant, après avoir reçu satisfaction de lui, souffrira au jour du jugement des tourments douloureux. »

Chez les Germains, on héritoit des haines et des inimitiés de ses proches ; mais elles n’étoient pas éternelles. On expioit l’homicide, en donnant une certaine quantité de bétail ; et toute la famille recevoit la satisfaction : « chose très utile, dit Tacite, parce que les inimitiés sont plus dangereuses chez un peuple libre». Je crois bien que les ministres de la religion, qui avoient tant de crédit parmi eux, entroient dans ces réconciliations.

Chez les Malais, où la réconciliation n’est pas établie, celui qui a tué quelqu’un, sûr d’être assassiné par les parents ou les amis du mort, s’abandonne à sa fureur, blesse et tue tout ce qu’il rencontre.


CHAPITRE XXII.
COMBIEN IL EST DANGEREUX QUE LA RELIGION INSPIRE DE L’HORREUR POUR DES CHOSES INDIFFÉRENTES.

Un certain honneur que des préjugés de religion établissent aux Indes, fait que les diverses castes ont horreur les unes des autres. Cet honneur est uniquement fondé sur la religion ; ces distinctions de famille ne forment pas des distinctions civiles : il y a tel Indien qui se croiroit déshonoré s’il mangeoit avec son roi.

Ces sortes de distinctions sont liées à une certaine aversion pour les autres hommes, bien différente des sentiments que doivent faire naître les différences des rangs, qui parmi nous contiennent l’amour pour les inférieurs.

Les lois de la religion éviteront d’inspirer d’autre mépris que celui du vice, et surtout d’éloigner les hommes de l’amour et de la pitié pour les hommes.

La religion mahométane et la religion indienne ont, dans leur sein, un nombre infini de peuples : les Indiens haïssent les mahométans, parce qu’ils mangent de la vache ; les mahométans détestent les Indiens, parce qu’ils mangent du cochon.


CHAPITRE XXV.
INCONVÉNIENT DU TRANSPORT D’UNE RELIGION D’UN PAYS A UN AUTRE.

Il suit de là, qu’il y a très souvent beaucoup d’inconvénients à transporter une religion d’un pays dans un autre.

« Le cochon, dit M. de Boulainvilliers, doit être très rare en Arabie, où il n’y a presque point de bois, et presque rien de propre à la nourriture de ces animaux ; d’ailleurs, la salure des eaux et des aliments rend le peuple très susceptible des maladies de la peau. » La loi locale qui le défend(84), ne sauroit être bonne pour d’autres pays, où le cochon est une nourriture presque universelle, et en quelque façon nécessaire.

Je ferai ici une réflexion. Sanctorius a observé que la chair de cochon que l’on mange se transpire peu ; et que même cette nourriture empêche beaucoup la transpiration des autres aliments : il a trouvé que la diminution alloit à un tiers ; on sait d’ailleurs que le défaut de transpiration forme ou aigrit les maladies de la peau : la nourriture du cochon doit donc être défendue dans les climats où l’on est sujet à ces maladies, comme celui de la Palestine, de l’Arabie, de l’Égypte et de la Libye.


CHAPITRE XXVI.
CONTINUATION DU MÊME SUJET.

M. Chardin dit qu’il n’y a point de fleuve navigable en Perse, si ce n’est le fleuve Kur, qui est aux extrémités de l’empire. L’ancienne loi des Guèbres, qui défendoit de naviguer sur les fleuves, n’avoit donc aucun inconvénient dans leur pays ; mais elle auroit ruiné le commerce dans un autre.

Les continuelles lotions sont très en usage dans les climats chauds. Cela fait que la loi mahométane et la religion indienne les ordonnent. C’est un acte très méritoire aux Indes de prier Dieu dans l’eau courante mais comment exécuter ces choses dans d’autres climats ?
Lorsque la religion, fondée sur le climat, a trop choqué le climat d’un autre pays, elle n’a pu s’y établir ; et quand on l’y a introduite, elle en a été chassée. Il semble, humainement parlant, que ce soit le climat qui a prescrit des bornes à la religion chrétienne et à la religion mahométane.

Il suit de là qu’il est presque toujours convenable qu’une religion ait des dogmes particuliers et un culte général. Dans les lois qui concernent les pratiques du culte, il faut peu de détails ; par exemple, des mortifications, et non pas une certaine mortification. Le christianisme est plein de bon sens : l’abstinence est de droit divin ; mais une abstinence particulière est de droit de police, et on peut la changer.

1 Comments:

At avril 09, 2006 7:34 PM, Anonymous Anonyme said...

Il y a aussi Ernest Renan, Arthur Schopenhauer("l'exécrable islam"), Claude Lévy Strauss, et encore plein d'autres dont Leibniz , Hume , Hobbes , tous ont dit ce qu'il y avait à dire sur cette infâme tyrannie théocratique...
Bravo et que s'agrandisse une si jolie bibliothèque.

 

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